Appel à communications

Écritures féminines ?

Journée d’études organisée par les Centres Heterotopos, Iconographè et CEREFREA

Université de Bucarest
21 janvier 2017

La question de « l’écriture féminine » a fait couler beaucoup d’encre, les principaux questionnements tournant autour des définitions conceptuelles de la notion. Tirant sa vitalité et son originalité des réflexions de Simone de Beauvoir, elle semble ouvrir un champ révolutionnaire, très en vogue dans les années ’75-’80, pour s’enfoncer ensuite dans de nombreuses impasses méthodologiques ou se muer progressivement en cliché . Toutefois, malgré les incessants débats autour de la question, cette notion continue de faire carrière et, d’une certaine façon, de faire école au service d’un monde sexuellement partagé. Elle continue à susciter des pistes de recherches et des discussions fécondes. À titre d’exemple l’on rappellera la journée doctorale organisée par la SELF en 2015 sur « L’Écriture féminine aux XX et XXI siècles entre stéréotype et concept »

Notre rencontre se propose d’interroger, une fois de plus, la validité et l’opérativité de cette notion. Force est de se demander avant tout si les approches sociologiques de la littérature, qui instrumentalisent des perspectives d’interprétation structurées par les genres, ne faussent pas le paysage herméneutique. Devrait-on considérer comme synonymes l’écriture « féminine » et l’« écriture-femme » ? L’écriture féminine passe-t-elle le cap d’une investigation philologique, historique ou anthropologique ? Quels sont les critères selon lesquels l’on peut la définir ? Peut-on supposer, à la manière de Béatrice Didier , qu’il y a des catégories littéraires typiques ou qui la privilégient ? Le roman ou le genre épistolaire sont-ils plus « féminins » que d’autres formes littéraires ? Et dans ce cas, de quel point de vue ou à quelle époque ? Au Moyen Âge par exemple les rares femmes qui écrivent se concentrent sur la poésie ou le récit bref, qu’il s’agisse du lai ou de la nouvelle, le roman restant essentiellement une narration racontée par les hommes et même, souvent, par les moines.

L’un des pièges à éviter serait, par ailleurs, celui de la confusion entre l’écriture et la réception. Comme l’observe Béatrice Didier, des récits qui suivent le modèle de La Nouvelle Héloïse pourraient être préférés par un public féminin aux temps de l’Europe moderne. Toutefois, les auteurs sont le plus souvent des hommes, tout comme le « flux autobiographique », parfois considéré typiquement féminin, reste du Moyen Âge à nos jours en grande partie le propre des hommes. S’il est vrai que la littérature élabore une anthropologie du corps féminin parfois bien délimité dans son identité spécifique, l’écriture de ce corps peut être aussi bien masculine que féminine. Devrait-on chercher des marques du discours comme l’emploi du « je » et des traces de la subjectivité qui caractériseraient la féminité? Comment et par quel angle méthodologique s’élabore une telle « écriture » ?

Replacer les accents, reformuler des questions, interroger les présupposés théoriques de l’écriture féminine et les tester sur des corpus différents, tels sont les quelques pistes que cette journée d’études se propose d’amorcer.

Comité scientifique : Dolores Toma, Catalina Girbea, Simona Necula, Larissa Luică

Le temps des interventions sera de 15 minutes. Les propositions (résumés de 500 signes) sont à envoyer à l’adresse : simona.necula@villanoel.ro avant le 15 novembre 2016

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1. Parmi les remises en cause récentes voir Merete Stistrup Jensen, « La notion de nature dans les théories de l’écriture féminine », Clio, numéro 11-2000, Parler, chanter, lire, écrire, 2007.
2. Voir entre autres Delphine Naudier, « L’écriture-femme : une innovation esthétique emblématique », 4/2001, p. 57-73.
3. http://www.fabula.org/actualites/ecriture-feminine-aux-xxe-et-xxie-siecles-entre-stereotype-et-concept_68019.php
4. L’Écriture-femme, Paris, PUF, 1981.
5. Ibidem, p. 19.