Un beau matin de printemps, le lac vole le visage frais de Narcisse tout en lui infligeant, en échange, le premier symptôme d’une fascination aseptique dont les échos vont se propager à travers toute la culture européenne. Le mythe ovidien de la contemplation de sa propre image a connu de nombreuses interprétations dont la plupart visent la dimension visuelle de l’histoire de Narcisse. Par conséquent, à l’époque de la Renaissance, Léon Battista Alberti le désigne comme inventeur de la peinture parce que, tout comme cette dernière est la fleur des arts, le jeune amoureux de son propre visage reflété dans le vernis miroir du lac se voit mué en fleur. Le raisonnement plutôt linguistique mis en jeu par Alberti signale l’enchevêtrement du regard et du geste créateur. La contemplation de son propre visage vue comme acte créateur dépend, dans la toute première séquence du mythe, de la méconnaissance du propre visage, selon Victor IeronimStoichiță. C’est toujours lui qui oppose Narcisse à Pygmalion, car le premier se fait châtier par les dieux alors que le second trouve l’accomplissement de son impulsion érotique attisé par sa propre création. 

Préoccupé par le triangle image-médium-regard, Hans Belting lit dans le désir de Narcisse un désir de se dissocier de son propre corps pour transgresser la limite qui le sépare de sa propre image. La surface devient une limite insupportable et le soubassement de la tension tandis que l’image se transforme en promesse de la profondeur. Le texte ovidien ouvre une suite d’interrogations d’actualité : la question du simulacre dans les médias ou dans la communication contemporaine, les risques et les bienfaits de l’introspection, l’avilissement de l’acte narcissique ou l’illusion des systèmes totalitaires. Les occurrences des hypostases narcissiques dans le milieu visuel débordent dans la vie contemporaine et s’attachent à une tradition : l’autoportrait, la méta-peinture, le selfie, l’autographe, etc. Toutes ces formules s’entrelacent et créent des pathologies identitaires, déclinées également en objets culturels et en expériences. Au surplus, la littérature et ses genres littéraires fondés dans la contemplation de sa propre personne – l’autobiographie, le journal, le blog – signalent l’ampleur du problème crée par la présence de Narcisse. La passion vide de la rivalité mimétique girardienne ou la compétition narcissique chez Michel Houellebecq témoignent aussi du même phénomène.  

Peut-on parler de la pratique narcissique comme pathologie de l’identité ? Ou, au contraire, n’est-elle qu’une célébration d’envergure du sujet ? Dans quelle mesure Narcisse représente-t-il une figure constitutive de la civilisation européenne ? 

Les étudiants de l’Université de Bucaresten partenariat avec le Centre de recherche en histoire des idées philosophiques de la Faculté de Philosophie (Université de Bucarest)et le CEREFREA Villa Noël (Université de Bucarest), vous invitent au colloque « Narcisse contemporain – sources et manifestations » qui aura lieu les 27 et 28 mars 2015 à la Villa Noël (6, Rue Emile Zola, Secteur 1, Bucarest).

 

Le colloque s’organisera selon deux axes :

1. Sources : interprétations historico-herméneutiques 

2. Manifestations contemporaines : analyses thématiques et applications 

 

Ce colloque aura pour langues de travail le français et le roumain.

 

Calendrier

  15 Janvier 2015 : appel à communications.

  15 Février 2015 : envoi de la proposition d’article sous forme d’un résumé d’environ 350˗400 mots en français ou en roumain à l’adresse suivante : colloquenarcisse@gmail.com. La proposition doit être accompagnée des noms, affiliations et adresses e-mail de tous les auteurs.

  1er Mars 2015 : notification des résultats.

  27-28 Mars 2015 : soumission de la variante définitive de l’article.

 

Organisation :

Comité scientifique

Andrei SIMIONESCU-PANAIT, Faculté de Philosophie, Université de Bucarest

Alexandra ILINA, Université de Bucarest – Sorbonne Nouvelle Paris 3

Ioan PANZARU (CEREFREA Villa Noël) – Président du comité scientifique

Radu TOMA, Ecole Doctorale en Sciences Sociales (EDSS), Université de Bucarest

Simona NECULA, CEREFREA – Villa Noël, Université de Bucarest

Larissa LUICA, Centre de réussite universitaire, Université de Bucarest

 

Comité d’organisation

Andrei SIMIONESCU-PANAIT, Faculté de Philosophie, Université de Bucarest

Alexandra ILINA, Université de Bucarest – Sorbonne Nouvelle Paris 3

Simona NECULA, CEREFREA – Villa Noël, Université de Bucarest

Larissa LUICA, Centre de réussite universitaire, Université de Bucarest